Qu'est-ce que la psychothérapie ? A quoi ça sert ?
Petite chronique de Christophe André qui permet de nous éclairer sur le sujet.

" Extrait de "L’Ecclésiaste", dans la Bible :
"Vanité des vanités, tout est vanité ! {…} Tous les fleuves vont vers la mer, et la mer ne se remplit pas, et les fleuves continuent d’aller vers la mer. Tout est ennuyeux. {…} Tout ce qui fut, cela sera ; ce qui s’est fait, se refera. Et il n’y a rien de nouveau sous le soleil. {…} Le sage voit devant lui et le fou marche à tâtons. Soit ! Mais je sais bien aussi qu’ils ont tous deux le même sort. {…} Il n’y a point de souvenir durable ni du sage ni du fou ; et le sage meurt bel et bien comme le fou."
Extrait de "Le Monde est Stone" (Starmania)
"J'ai la tête qui éclate / Je voudrais seulement dormir / M'étendre sur l'asphalte / Et me laisser mourir. / Stone / Le monde est stone / Je cherche le soleil / Au milieu de la nuit…"
Voilà, ces extraits, c’était pour les personnes qui pensent que la psychologie et la psychothérapie, c’est de la prise de tête contemporaine. Mais non ! Même il y a très longtemps, même en 1979 pour Starmania, même en 300 avant notre ère pour L’Ecclésiaste, la souffrance psychique était là ; elle reste là aujourd’hui, et avec elle le besoin d’en être soulagé.
La psychologie est certes une discipline nouvelle, qui prend naissance à la fin du XIXe siècle, mais elle a de lointains ancêtres. En Orient, le bouddhisme, dont la naissance est due au désir de Siddhārtha Gautama de comprendre et soulager les souffrances humaines. En Occident, la philosophie, qui prend naissance en Grèce Antique, non pour spéculer mais pour aider les humains à devenir meilleurs, au travers de nombreux efforts et exercices liés à la vie quotidienne.
Le philosophe et historien Pierre Hadot qui fut l’un des premiers à montrer cela, expliquait que parmi les exercices spirituels proposés par les Grecs, trois revenaient souvent : exploration, surplomb et expansion de soi.
L’exploration de soi, bien sûr, apprendre à se connaître pour mieux freiner ses passions tristes et se rapprocher de ses idéaux ; dans le but que décrivait le philosophe latin Plotin : « Ne cesse jamais de sculpter ta propre statue. » Cette exploration de soi, c’est bien sûr le domaine privilégié de la psychothérapie.
Après l’exploration, il y a le surplomb de soi : prendre du recul, de la hauteur, s’écarter de la mêlée de ses pensées, ses émotions, ses intérêts, pour considérer sa vie de plus haut ; pour se demander ce qui compte le plus pour soi, que l’on oublie parfois ; pour réfléchir à ce qui est important dans nos vies (l’amour, la nature…) et que l’on sacrifie souvent à ce qui nous semble urgent (les horaires, les factures…). Ce surplomb de soi peut nous être offert par certains moments de la thérapie, mais pas seulement : ce sont aussi tous les instants où l’on arrête sa course du quotidien, pour se demander si notre existence va là où nous voulons.
Enfin, il y a l’expansion de soi, qui consiste à s’oublier et à se relier au monde environnant ; à cesser de vouloir constamment être unique et singulier, et à découvrir aussi que l’on est élément d’un tout : un humain au milieu des humains, et semblable à eux ; un vivant au milieu du vivant ; rien d’autre à faire alors que ressentir, et savourer le bonheur simple d’exister. Cette expansion de soi nous est offerte par exemple par la méditation, mais aussi par la prière et toutes les formes de spiritualité, laïque ou religieuse.
Ce modèle antique nous rappelle que la psychothérapie est un processus qui passe souvent par ces trois étapes : d’abord se comprendre (l’exploration de soi), puis prendre du recul (le surplomb de soi), puis s’oublier et s’ouvrir au monde (l’expansion de soi).
Car la thérapie, ce n’est pas qu’un soin : elle ne consiste pas seulement à supprimer nos souffrances, mais aussi à s’en libérer, à faire qu’elles exercent moins d’emprise sur nous. Elle n’est pas qu’un soin, donc, mais aussi une quête : quête de soi, de sa place dans le monde, de sa responsabilité envers les autres, peut-être…
J’aime bien cette remarque, que l’on attribue, sans certitude, à Nelson Mandela : "Que vos choix reflètent vos espoirs, et non vos craintes". Voilà, c’est une belle définition possible de la psychothérapie : nous aurons toujours des peurs, des colères, des tristesses, toujours un "pet de travers" comme on dit à Toulouse. Et la thérapie, c’est ce qui nous aide à ce que ce ne soient plus tous ces pets de travers qui dirigent nos vies, mais nos idéaux et nos espoirs. "
Christophe André
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